L’enjeu de la structuration de l’écosystème français
Big Data par François Bourdoncle
Propos recueillis
par Matthias Fille, ICT Advisor chez CCI Paris IdF
François Bourdoncle est le cofondateur et actuel Directeur Technique d'Exalead,
aujourd'hui filiale de Dassault Systèmes. Il est membre de la Commission Lauvergeon "Innovation 2030"[1] qui a remis son rapport à François Hollande en octobre
dernier : "Un principe et sept ambitions pour l'innovation"[2]. François est également co-pilote (avec
Paul Hermelin, PDG de
Capgemini) du plan d’action Big Data, qui compte
parmi les 34 grands projets de la "Nouvelle France industrielle" du
Ministère du Redressement Productif. François nous partage sa vision du Big
Data, les risques encourus à vouloir nier cette révolution numérique. Il dresse
également les pistes pour favoriser l’émergence d’un écosystème vertueux autour
des Big Data en France.
Nous avons dépassé le simple prisme
technologique du Big Data. S’attarder sur la primauté technologique est une illusion, c’est désormais un enjeu de business
transformation. En effet, il ne
faut pas appréhender le Big Data par sa définition opérationnelle ou sous
l’ornière technologique, mais par ses impacts et les effets cela va produire.
Cela va ainsi exclure la vacuité de certains débats ambiants. Le centre de
gravité du débat ne sera plus axé sur la masse de données (à partir de quelle
masse de données peut-on considérer qu’on fait du Big Data ?) ou sur les
enjeux techniques d’optimisation organisationnelle. Il faut s’attarder sur d’autres
phénomènes : enjeux de conception produits, de business transformation, nouveaux
modèles d’affaires, d’organisation client et de gamme de produits. Sur la phase
de développement des infrastructures et des solutions technologiques
sous-jacentes, le terrain est balisé. Les dés sont déjà lancés, que le meilleur
gagne ! Donc, la bataille n’est plus sur l’infrastructure, mais bien sur
les usages, sur le développement de nouveaux modèles économiques et les
déclinaisons verticales. En matière de Big Data, il faut passer du « comment » au « quoi » et au
« pour quoi ».
Par exemple, la vraie création de valeur réside dans des boîtes comme
Withings ou Criteo, car elles reposent sur
un business model complètement intégré verticalement, qui créent,
captent, analysent, valorisent et monétisent de la data. Pour faire de l'innovation intelligente, il faut
placer au même endroit les données qu'on fabrique et celles qu'on recueille.
On voit par ses exemples que la France a l’opportunité de se frayer un chemin
sur l’échiquier mondial des usages. Là
où tout n’est finalement pas encore bien défini.
Mais l’Hexagone doit composer
avec son marché, qui n’a pas la taille d’un marché US, ni la même capacité
d’investissement.
Donc,
en tant que chefs de file de ce « chantier » avec Paul, nous avons
identifié les leviers que les pouvoirs publics peuvent actionner pour
favoriser l’émergence d’un écosystème français vertueux du Big Data,
exportateur et créateur d’emplois. C’est donc avant tout un objectif
économique, académique et industriel. Nous voulons rendre le terrain français fertile pour l’ensemble de
cet écosystème en changeant le « PH de l’aquarium ». Sur le mode
opératoire, l’ambition de nos travaux
n’est pas de bâtir une nouvelle filière industrielle au sens classique du
terme, comme c'est le cas par exemple pour le plan "Avion
électrique". En
effet, le Big Data est en réalité plus un écosystème qu’une filière au sens
traditionnel du terme, car elle n’a pas vocation à déboucher sur un produit
industriel précis. Les Big
Data sont quelque chose de beaucoup plus écosystémique et horizontal, parce que
cela irrigue tous les secteurs.
En effet, le Big Data
est un enjeu critique pour tous les secteurs de l’industrie et des services,
notamment ceux qui n’ont pas été encore fortement impactés par la
révolution numérique. Il ne faut pas que nos grands groupes ignorent cette
révolution numérique, comme cela a été le cas pour le commerce de proximité, la
presse, l’industrie du disque, ou très bientôt la télévision et le cinéma. Car le Big Data va être le moyen par lequel
la révolution numérique va s’inviter sur des secteurs qui n’étaient pas
irrigués à ce jour. Ainsi,
il faut éviter que ne
se reproduise cet aveuglement que ces secteurs ont connu. Sur ces secteurs, les acteurs n’ont pas voulu appréhender
cette révolution numérique jusqu’à ce que cela devienne irréversible. Donc, il faut éviter ce déni
de réalité, qui est une forme de défense extrêmement dangereuse. Il
faut éviter le « jusque-là tout va
bien ».
Car à vouloir refuser de se challenger sur son propre business
model, de nombreux acteurs courent le risque de la désintermédiation par des
pure players de la data comme le GAFA[3], IBM ou LinkedIn. Ceux que j’appelle les « barbares modernes[4] ».
En effet, le succès de l’innovation orientée grand public de ces 15 dernières années (Internet, moteurs de recherche, téléphonie
mobile, réseaux sociaux, etc.) leur confèrent un accès direct au grand
public et à ses données. Cette connaissance de la relation clientèle est leur
outil pour se positionner dans tous les domaines. Comme le démontre l’actualité
récente[5], ces spécialistes de la data regardent les déclinaisons
possibles dans d’autres secteurs traditionnels, fortement
« challengeables » sur leur business model. Ainsi, le risque pour les
grands groupes établis est lié à la menace que ces « barbares » utilisent
cet actif pour aller partout où il y a de l'inefficacité dans la relation
clients.
Par exemple dans l'assurance, la santé, le crédit, le marché de
l’électricité, les opérateurs de télécommunications etc.
Illustration dans le domaine de l’assurance.
Avec Android sur votre terminal, Google dispose de votre géolocalisation et
accéléromètre. Il connait votre mode de vie, type de conduite, oisiveté,
mobilité, préférences, etc. En mixant ces datas et en faisant travailler leur
arsenal algorithmique, ils seront en mesure de vous proposer une offre
assurantielle, moins chère, granulaire, extrêmement sophistiquée quant à votre
profil de risque. Et ils capteront la valeur des bons clients, les CSP+, ceux
dont la probabilité de sinistralité est faible.
Ces nouveaux acteurs réinstaureront dès lors
une nouvelle forme d’intermédiation. Et qui dit intermédiation, dit également
sous-traitance et érosion des marges. Ces pure players du numérique auront la
capacité d’imposer un diktat aux Brick and Mortar (acteurs traditionnels) et de
les reléguer à un simple rôle d’opérateurs et prestataires techniques
interchangeables. Ces derniers se seront fait confisquer la relation client qui
représente la grosse partie de la valeur. Car la majeure partie de la valeur n’est
plus captée par celui qui détient la technicité de l'objet industriel, mais par
celui qui détient la technicité de l'optimisation de l'objet ou de la relation
client grâce aux technologies du Big Data.
Les entreprises françaises doivent absolument
réinventer leurs services clients, où à défaut, les exécuter mieux que les
autres. D’autant plus qu’il y a une vraie demande de produits personnalisés
dans ces domaines. De surcroît, trop d’industries comme le crédit, l’assurance
et la finance se sentent protégés car se pensent à la pointe avec leurs outils
informatisés. C’est illusoire. L’informatique pur n’y est qu’un outil de
production et de productivité, il n’a pas d’impact sur le business model et sur
la transformation du business. A cet égard, le capitalisme français a un
problème: il est beaucoup trop dans l'entre-soi et la courtoisie. Plutôt que
d’encaisser de front cette 3ème révolution numérique, il faut
anticiper sa dynamique et ses enjeux de business transformation. Cette
ouverture culturelle et l’acceptation de la compréhension de la
désintermédiation numérique sont critiques pour changer leur logiciel de
pensée.
Donc, l’une
des priorités est d’inciter les grandes entreprises françaises,
aujourd’hui en retard sur leurs homologues américaines, à lancer des projets à
grande échelle d’exploitation des données massives à des fins de business. Pour
ce faire, dans le cadre de notre chantier, nous travaillons sur plusieurs
pistes avec les grands groupes. Premièrement, annihiler justement ce déni de
réalité et évangéliser. Et également valoriser l’innovation ouverte. Pour les
grands groupes, il est aujourd’hui absolument vital de collaborer travailler
avec des start-up.
Parce que, jusqu'à présent, il faut bien reconnaitre que la
tendance est plutôt de les racheter pour les tuer avant qu'elles puissent
devenir des concurrentes. Nous devons favoriser l’interaction
vertueuse du tandem grands groupes (utilisatrices) et start up du Big Data
(techno providers). Idéalement, il faudrait que les grands groupes payent trois
fois ! Les financer en early stage (capital-risque), les aider à grandir
(logique business) et les racheter seulement au moment opportun. Sans
cela, ces acteurs en herbe ont peu de chance de grandir, de démonter la
scalabilité de leur projet et de trouver les forces de s’attaquer à l’export
pour contrer l’étroitesse et l’aversion « culturelle IT » de notre
marché intérieur. Donc l’effet de levier de cette mesure est double et
convergent pour ces deux typologies d’acteurs.
Autre réflexion connexe. J’ai l’obsession de
changer la perception de l’innovation française. Comme chacun sait, la R&D
est généreusement financée par de nombreux véhicules de financement publics
(FUI, Crédit d’Impôt Recherche, etc.). Il faut s’en féliciter. Mais au regard
des investissements publics consentis, l’effet produit y est trop minimal. La
R&D est trop peu impactante lors de la mise sur le marché pour changer
« les règles du jeu » et créer de la valeur. Au-delà de la dimension
exploratoire des projets de R&D, ces PME et startup ne doivent pas oublier
qu’il leur faut un marché. D’où notre réflexion de créer un appel d’air et de
tirer cet écosystème par l’aval en créant le marché. Notre volonté est donc de
stimuler les projets et POC côté demandeurs. Nous serons ainsi confortés sur :
l’existence potentielle d’un marché, l’expérimentation à l’échelle de ces
projets par les grands groupes, l’aide aux PME et leur besoin de scalabilité de
projets. Les PME ont davantage besoin d’un carnet de commande étoffé plutôt que
de subventions (côte offre / amont). Cette logique aura un effet de levier
maximal : créer le marché plutôt que l’offre, et réduire le time-to-market
de nos startup. Par ailleurs, via le récent lancement de la plate-forme TeraLab[6], les entreprises et chercheurs disposeront
d’un environnement de recherche et d’expérimentation (briques technologiques,
ressources de calcul grande échelle). Et pour ce
faire, il est essentiel que cette structure recense les « bonnes volontés
» en matière de mise à disposition de données de la part des entreprises.
Par ailleurs, tout comme le
logiciel de pensée, notre volet réglementaire doit évoluer. Sur le premier
aspect, il faut permettre aux
usages de s’installer, de s’expérimenter. Sur le volet réglementaire, nous
pouvons être fiers d'avoir exporté notre modèle de la loi Informatique et Libertés
au niveau européen. Mais cette loi a un problème : la finalité initiale de
la collecte des données personnelles est gravée dans le marbre, on ne peut pas
la faire évoluer lors des utilisations ultérieures. Or les Big Data, ça ne
fonctionne pas comme ça, ça bouge. La déferlante va faire craquer cette loi,
c'est inévitable. Il faut refondre toute la question du volet législatif en
matière de réutilisation des données, afin de faciliter, sans lever toute forme
de contrôle, l’usage des données. Il
faut ainsi pouvoir expérimenter avant de légiférer et déplacer l’équilibre en
faveur de l’innovation. A cet égard, il
serait illusoire de croire que de s’interdire le droit d’expérimenter sur
l’utilisation innovante des données serait un garde-fou contre les dérives
potentielles.
Ce principe d’audace, d’action et d’expérimentation doit pouvoir
rééquilibrer le rapport de force avec notre principe « sacro-saint »
de précaution inscrit dans notre constitution. Les usages innovants et disruptifs
comportent une part évidente de risque. Donc, avant que la CNIL n’empêche
d’expérimenter, nous devons appréhender ces usages, sectoriellement et de
manière jurisprudentielle.
Or, actuellement, l’utilisateur des données doit
respecter l’usage intentionnel pour lequel les données ont été collectées : la
loi doit évoluer dans son principe même. Nous pourrions remplacer le principe
d’intentionnalité par celui de réciprocité, de passer d’une logique déclarative
à une logique d’adhésion, grâce à la rédaction d’une charte d’adhésion à des
valeurs de base, par secteur, avec
sanction si non-respect de la vie privée.
De plus, il faut observer l’évolution des
usages et procéder systématiquement à une étude d’impact économique avant de
légiférer « défensivement et mécaniquement ». Comme pour le besoin de
stabilité fiscale, les entreprises ont besoin de ce gage de sécurité. Sans cela,
les entreprises ne pourront pas opérer. Sans ce
droit à l’expérimentation, mis en avant par le rapport de la Commission
Lauvergeon, il sera très difficile de faire émerger une filière Big Data
dans notre pays. C’est de l’action et l’expérimentation que naitront la
réflexion et les usages, et non pas l’inverse. Mais comme toute
révolution industrielle, l’entrée de notre civilisation dans l’ère du
« tout numérique » ne se résume pas à ses risques potentiels, et la
crispation légitime sur la protection de la vie privée ne doit pas masquer les
fantastiques enjeux économiques et citoyens que représente le traitement
intelligent des données massives.
A ce titre, l’Etat se doit d’être une
locomotive d’expérimentation. Comme pour les entreprises, ses enjeux sont tout
aussi considérables (gestion des ressources, des infrastructures, de l’énergie,
des transports, du marché de l’emploi, des finances publiques, etc). Il doit aussi montrer l’exemple sur des thèmes
comme les data dans la santé avec les données de la CNAM, qui seraient un
fabuleux gisement de création de valeur avec de nouvelles applications et une
nouvelle façon de concevoir les parcours de soins : passer d’une démarche
curative à une logique préventive grâce
au suivi et analyse en temps réel. Il en va de même dans l’évaluation et
le pilotage des politiques d’action publiques. A l’heure où le niveau de
défiance des citoyens vis-à-vis de la classe politique est le plus élevé de
l’OCDE, voilà une formidable opportunité de recentrer le citoyen au cœur du
débat sociétal et de faire monter d’un cran le niveau d’exigence des citoyens
sur l’exécutif central et les collectivités.
En synthèse, je dirai que nous ne
sommes donc pas en retard, et nous avons d’autre part de nombreux
atouts, comme par exemple des ingénieurs généralistes de haut niveau,
formés à l’informatique, aux mathématiques et aux statistiques, et qui
sont très largement plébiscités au niveau international, à commencer par
la City et Wall Street. Ne serait-il pas plus vertueux de leur permettre
de réussir en France en aidant nos entreprises à déployer des projest Big Data
à grande échelle, en créant de nouveaux business model, en réinventant la
relation client par la donnée?
Comme je l’ai évoqué, nous avons également
la chance d’avoir quelques très belles « success stories »
comme Critéo ou encore Withings qui est l’un des leaders mondiaux de
l’Internet des Objets, qui va être l’un des grands pourvoyeurs de données dans
le futur. Cet Internet des Objets, justement, qui va complètement révolutionner
la manière dont les produits sont conçus et commercialisés, ainsi que la
manière dont l’innovation va se nourrir de l’exploitation du suivi des
produits en condition opérationnelle. Espérons que les dossiers Big Data prochainement
financés dans le cadre du « Concours Mondial de l’Innovation 2030 »
puissent accoucher de futures pépites. Mais nous avons actuellement trop peu de
champions numériques, ces « modernes ». Donc, j’ai l’ambition aussi
de faire entrer les anciens (nos grands groupes) dans l’ère de cette 3ème
révolution numérique.
[2] http://www.direccte.gouv.fr/IMG/pdf/LAUVERGEON_1_principe_et_7_ambitions.pdf
[3] GAFA : acronyme
pour désigner Google, Amazon, Facebook et Apple
[4] Article interview de
Challenges 20-01-2014 «
[5] Récentes acquisitions
de Google dans le domaine de l’assurance et de la maison intelligente connectée
ou investissement de 250 million $ sur Uber, compagnie de VTC
[6] Centre de ressources
technologiques destiné à des projets de recherche, d’innovation et de
prototypage dédiés aux big data, lancé par l’Institut
Mines-Télécom et le Groupe des Écoles nationales d’économie et de statistique
(GENES)
Opportunité de prêt offerte par M. Benjamin qui sauve ma famille de la servitude financière {lfdsloans@lemeridianfds.com}
RépondreSupprimerBonjour à tous, je suis la mère célibataire de Putri Adiratnaa de Jakarta, je voudrais partager ce grand témoignage sur la façon dont j'ai obtenu un prêt de M. Benjamin, lorsque nous avons été chassés de notre maison alors que je ne pouvais plus payer mes factures, après se faire arnaquer par diverses sociétés en ligne et refuser un prêt de ma banque et d'une autre caisse populaire que j'ai visitée. Mes enfants ont été pris en charge par la famille d'accueil, j'étais tout seul dans la rue. Le jour où j'ai honteusement rencontré un camarade de classe qui m'a présenté Daisy Maureen. Au début, je lui ai dit que je ne suis plus prête à prendre le risque de demander un prêt en ligne, mais elle m'a assuré que je recevrais mon prêt de leur part. Dans un second temps, en raison de mon sans-abrisme, j'ai dû faire un essai et demandé le prêt, heureusement pour moi, j'ai reçu un prêt de 80,000.00 $ de M. Benjamin. Je suis heureux d'avoir pris le risque et demandé le prêt. Mes enfants m'ont été rendus et maintenant je possède une maison et une entreprise à moi. Tous les remerciements et gratitude vont au service de financement Le_Meridian et à l'aide de M. Benjamin pour m'avoir donné un sens à la vie alors que j'avais perdu tout espoir. Si vous recherchez actuellement une assistance de prêt, vous pouvez les contacter via: {lfdsloans@lemeridianfds.com} ou WhatsApp + 1-989-394-3740